Enquête : J'ai trouvé le seul parlementaire insoupçonnable...

L'affaire Thomas Thévenoud m'a agacé au plus haut point : les mœurs politiques sont tellement dévoyées que voilà un homme politique, député notamment et principalement, membre de la commission d'enquête parlementaire dans l'affaire Cahuzac, donc un responsable politique de haut niveau qui ne déclare pas ses impôts depuis 3 ans (comme il s'agit là de la prescription fiscale, nous a-t-on tout dit sur la durée de ces "absences" de déclaration ?) alors qu'il sait qu'il se fera pincer un jour ou l'autre et que le redressement fiscal (taxation d'office plus pénalités) sera important, sans parler du discrédit politique évident... Plutôt que de me lancer dans des analyses psychologiques à l'origine de tels manquements civiques, je constate qu'une fois de plus, les hommes de pouvoir se sentent intouchables même quand d'évidence ils se fourvoient grossièrement. 

Qui ne se souvient des bravades de Cahuzac ou de Woerth, des airs effarouchés de ceux qui "offrirent" 400 millions d'euros à Tapie, sans parler des multiples affaires de financement illégal de campagne électorale qui sont le lot quotidien de Sarkozy, ou les errements de la vie privée de DSK, etc. Cela remonte à loin, puisque les diamants de Giscard avaient déjà fait la une il y a une quarantaine d'années. 2 remarques :

- les femmes semblent épargnées par ces dérives;

- le FN, qui dénonce ces mœurs, réussit pourtant, avec peu d'élus, à se mettre, en proportion, au diapason : soupçons sur le financement de la campagne du maire d'Hayange, origine de la fortune de JM Le Pen, enrichissement d'un conseiller régional avec la vente de viande halal...

"Ils ne mourraient pas tous, mais tous étaient frappés" (Les animaux malades de la peste. La Fontaine). 

Tous frappés ? J'ai voulu donc enquêter pour savoir si personne n'échappait à cette malédiction. Je souhaitais donc, dans un premier temps, vérifier auprès des 500 000 élus politiques français, mais la tâche était insurmontable... Je me suis donc borné à chercher auprès des parlementaires français de l'Assemblée nationale et du Sénat. Je vous passe les différents critères que j'ai croisés, mais mon tri fut de sélectionner ceux qui ne cumulaient pas de mandat national avec un mandat dans un exécutif local, ceux qui en étaient à seulement leur premier ou deuxième mandat national, ceux qui n'exerçaient plus professionnellement et, enfin à une enquête poussée sur l'absence de compte non-déclaré en Suisse, au Luxembourg, aux îles Caïmans et à Singapour. Dernier filtre : l'absence de condamnation sur le plan des mœurs et de la fiscalité. Bingo ! Un seul parlementaire (j'avais écarté les femmes de mon étude) passa à travers les mailles de mon filet ! Mais il tint à conserver l'anonymat; peut-être qu'à travers les réponses à mes questions, certains arriveront-ils à le débusquer. Voici ses réponses à mes questions...

AA : Félicitations ! D'après mes critères, vous êtes le seul parlementaire à correspondre aux exigences morales des Français...

X : Merci, mais je ne l'ai pas fait exprès...

AA : Comment avez-vous pu résister à l'attrait d'un mandat local ?

X : J'habite une commune de 35 habitants, et c'est de la même famille que sont issus les maires depuis 154 ans... De plus, je n'ai jamais réussi à passer mon permis de conduire, et, sans voiture, c'est difficile de devenir conseiller général parce qu'il faut parcourir, sans cesse, toutes les communes du canton...

AA : Avez-vous, parmi vos attachés parlementaires, des membres de votre famille ?

X : Ben, je n'ai ni femme, ni enfant et je suis fils unique... Mais le parti m'a fourni les assistants dont j'avais besoin. Et comme ils sont du sérail, ils travaillent bien. J'ai les 2 enfants de mon collègue de la circonscription voisine et la maîtresse du responsable local de mon parti... Alors, la politique, ils connaissent et je leur fais confiance à 100%...

AA : On reproche aux élus leur approche clientéliste de la politique ? Quelle est votre attitude en ce domaine ? 

X : Moi, comme je ne sais pas me servir d'un ordinateur, je laisse mes assistants répondre au courrier et recevoir les citoyens de la circonscription, donc je ne peux pas faire de clientélisme, comme vous dites...

AA : Que pensez-vous des dérives de beaucoup d'hommes politiques ?

X : Vous savez, les hommes politiques ne sont que des hommes qui, comme tous les Français, quand ils peuvent ne pas déclarer des revenus, quand ils peuvent frauder le fisc ou lorsqu'ils flairent la bonne affaire, ne se privent pas d'en profiter. Qui ne cherche à placer ses enfants, à coucher avec la voisine ou à trouver le bon filon pour passer des vacances à l’œil ou à passer devant tout le monde dans une file d'attente. Qui ne cherche à obtenir des places gratuites au spectacle ou au match de foot ? 

AA : Mais enfin, les Politiques doivent être exemplaires !

X : Que les citoyens commencent à l'être eux-mêmes, les politiques, par définition, le deviendront !

AA : Avez-vous des ambitions politiques ?

X : Oui, bien sûr! Être réélu lors des prochaines élections législatives...

AA : Sinon ?

X : Soit je m'inscris à Pôle Emploi, soit, grâce à mon carnet d'adresses, je peux rebondir...

AA : Aujourd'hui pensez-vous avoir suffisamment de revenus pour exercer votre fonction ?

X : Oui! Mais heureusement qu'on à les frais de représentation forfaitaires et non imposables. Cela double les indemnités et ce n'est pas superflu ! Avec ça, je peux cotiser un max pour la retraite et placer le reste pour le cas où...

AA : Mais je croyais que cette IRFM servait à payer des frais de mandat tels que la permanence, le salaire des secrétaires dans cette permanence, organiser des réunions de concertation, etc...

X : Oui, oui, mais ça c'est du clientélisme dont vous parliez : recevoir et dorloter des électeurs, embaucher leurs filles comme secrétaires pour faire plaisir aux amis, organiser des réunions où on picole et on bouffe, c'est vraiment acheter des électeurs et je m'y refuse comme je vous l'ai dit tout à l'heure !